Daisy, superwoman et dj
« Cette façon de s’habiller avec des treillis et une capuche, ce n’est vraiment pas pour moi. » dit-elle en faisant allusion à l’accoutrement des adeptes des free-party, qui dansent à l’air libre au son des musiques électroniques.
Le monde de la nuit est généralement très masculin. Et d’autant plus si l’on joue du « hardcore » - la branche dure des musiques électroniques. Daisy, avec ses longs cheveux blonds tirées en queue de cheval, son chandail, ses bottes en cuir et ses boucles d’oreilles scintillantes, est une sorte d’ovni. Être une fille est déjà en soi quelque chose d’exotique, dans ce milieu composé en majorité d’hommes. Mais être en plus féminine…
Et puis c’est « une tête », comme le dit fièrement Cécile, la patronne de son label, Epileptik. Elle aurait pu aussi devenir une brillante chercheuse. En 2002, elle récolte un doctorat de neurogénétique - avec les félicitations du jury- au CNRS (Centre National de Recherche Scientifique). Hélas, son laboratoire est contraint à la fermeture, ce qui lui interdit les portes du concours pour obtenir un poste. « Ce fut une véritable dépression nerveuse. Mon rêve s’effondrait. Mais à côté, j’avais aussi plein de dates de tournées déjà fixées. Alors, le choix a été vite fait. »
Sa première rencontre avec les musiques électroniques a eu lieu vers 17 ans, la première fois qu’elle est sortie en club. Ce fut le déclic. Puis quelque temps plus tard, Daisy a une seconde révélation, en regardant Manu le Malin (un dj de la scène hardcore qui a commencé dans les années 90’, ndlr) jouer des platines dans sa cabine du Rex Club. « J’ai tout de suite voulu savoir comment cela marchait. ». Elle commence très vite à se produire sur scène, notamment dans des soirées qu’elle organise avec l’association qu’elle co-fonde, Insomniacs. « On était une bande de jeunes qui s’éclatait, on louait des salles, un théâtre, une cave. On amenait le son, la déco, et hop, c’était parti. »
Daisy n’est alors entouré que d’amis du sexe masculin, qui en font leur mascotte. Mais cela ne la dérange pas, elle concède au contraire volontiers son côté garçon manqué. « Je n’aime pas les chichis, et puis un garçon c’est plus franc, ça me convient mieux ! ». Daisy possède un caractère bien trempé, qui lui a permis de s’affirmer dans ce milieu. « C’est quelqu’un d’entier, confirme Natacha, une amie d’enfance. Elle ne fait que ce qu’elle aime. Elle ne se contente pas d’être juste moyenne. Elle veut tout réussir. ». Daisy, une superwoman ? Pas tout à fait, puisque de son propre avis se cache sous cette carapace une femme « angoissée, et qui n’a pas trop confiance en elle. »
Ce mélange d’angoisse et d’énergie positive est précisément ce qui fait la particularité de la musique de Daisy, à la fois sombre et mélodieuse. Malgré le fait que sa musique soit très peu connue du grand public, Daisy a réussi à faire de sa passion un métier dont elle vit correctement. Elle est même, dans le genre musical qui la concerne, la seule femme française à tourner au niveau international.
Sa féminité a-t-elle été un obstacle ? est-on tenté de se demander. « C’est à double tranchant, répond-t-elle sur un ton nuancé. Parfois, on se fait booker (programmer, ndlr) uniquement parce qu’on est une fille et que c’est plus original. Mais il y a aussi l’inverse : des gens qui ne veulent pas t’inviter précisément pour ça. »

Le 29 février 2008 au Batofar